L?art et la manière d?annoncer une mauvaise nouvelle |
06-05-2009 | |||||||||||||||||||||||
Cela n?arrive pas tous les jours, mais une ou deux fois par mois. Une future maman arrive seule, avec son compagnon, sa mère ou ses jeunes enfants, pour une échographie de routine. Elle va enfin connaître le sexe de son enfant, elle vient surtout pour cela. J?observe le f?tus, je mesure le périmètre crânien, je fais les gestes habituels et je les commente. Et puis je découvre une anomalie grave. Je ne cache pas ce que je vois, mais je lui dis aussi qu?une seconde échographie sera nécessaire pour confirmer mon diagnostic. En une minute, je viens de lui briser le c?ur. Un nouvel examen est programmé, parfois même dans les minutes qui suivent avec un autre échographiste que j?assiste. Travailler sous le regard de la personne concernée, observer le bébé qu?elle porte est souvent, dans ces conditions, mal ressenti par la future maman. Encore en état de choc, la patiente a alors l?impression d?être tenue à distance, trompée, même si nous prenons le soin de traduire les mots ?ventricule? ou ?liquide céphalorachidien? que nous venons d?échanger entre professionnels au-dessus de sa tête. Je tiens toujours à dire que c?est grave et à préciser ce que je crains: un spina-bifida ou une hydrocéphalie, par exemple, en expliquant avec des mots accessibles ce que cela provoque comme type de handicap. Je me suis formée, avec un pédopsychiatre, à l?annonce d?un handicap ou d?une maladie grave. Ainsi, j?ai pu comprendre que quoi qu?il arrive, celui qui annonce la mauvaise nouvelle est souvent pris pour tête de Turc. Je conçois bien que les mères qui ont vécu cela en gardent un souvenir brutal. La salle d?attente est pleine à craquer. Au mieux, je pourrais passer environ une heure en tout avec cette personne. Elle n?entendra qu?une petite partie de ce que je lui dirai. J?ai pu le constater un très grand nombre de fois: nos paroles, à ce moment-là, ne passent pas. Dès mes premiers mots, la patiente évoque souvent l?interruption thérapeutique de grossesse, pour parfois se raviser ensuite. Cette question ne devrait être abordée que plus tard, avec des faits mieux établis, mais elle survient très vite, surtout lorsque le handicap prévisible est apparent. Je laisse toujours un numéro de téléphone, et éventuellement les coordonnées d?associations de parents d?enfants handicapés. J?ai appris à comprendre et à assumer l?agressivité, l?incompréhension vis-à-vis de notre travail. Car il n?y a pas, à ma connaissance, une bonne façon d?annoncer une mauvaise nouvelle. Partager cet article :
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