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Perturbants perturbateurs endocriniens

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Phtalates, bisphénols, PCB, pesticides, retardateurs de flammes… Ils sont un peu partout. les perturbateurs endocriniens et ne nous veulent pas du bien. Qu’est-ce que c’est, quels sont les effets, que faire et comment se protéger des perturbateurs endocriniens ?

Perturbateurs endocriniens, qu’est-ce que c’est ?

Les perturbateurs endocriniens sont des substances exogènes, c’est-à-dire étrangères à l’organisme, qui sont susceptibles d’affecter le système hormonal. Ces substances peuvent par exemple imiter les effets d’une hormone, les bloquer ou interférer avec son mécanisme de production ou de régulation. Conséquences des perturbateurs endocriniens possibles : augmentation des risques de cancer, de diabète, d’obésité, perturbation de la fonction reproductrice, de la croissance, du métabolisme – chez l’individu exposé, mais également chez ses descendants. Mais ils menacent également le développement du système nerveux central et pourraient détraquer notre QI : « Les perturbateurs endocriniens ont un impact sur le cerveau et le développement de maladies mentales », affirme Barbara Demeneix, spécialiste de la thyroïde et professeure au laboratoire Évolution des régulations endocriniennes (CNRS-MNHN), qui met en garde contre les risques d’augmentation des troubles du spectre autistique et du trouble de déficit de l’attention avec hyperactivité (TDAH).

Des polluants persistants

L’action des perturbateurs endocriniens est d’autant plus problématique qu’elle peut se révéler tardivement et perdurer dans le temps. « Certains produits polluants comme les pesticides de première génération ont été interdits, mais ils sont encore présents dans l’environnement car très persistants », alerte Olivier Kah, neurobiologiste et directeur de recherche émérite au CNRS. En outre, certains d’entre eux, désormais supprimés, laissent la place à d’autres, pas franchement plus sympathiques. « On a fait beaucoup de publicité autour du bisphénol A, interdit depuis janvier 2015, rappelle ainsi le scientifique. Ce qu’on ne dit pas, c’est qu’il a été remplacé par d’autres bisphénols qui peuvent être aussi oestrogéniques [ils imitent une molécule naturelle, responsable du cycle ovarien, ndlr]. C’est la technique du chiffon rouge : on ne regarde pas ailleurs… »

Quelles alternatives aux perturbateurs endocriniens ?

Ils sont partout : des perturbateurs endocriniens dans les produits d’hygiène et de beauté, les produits pharmaceutiques, les pesticides, les ustensiles de cuisine, l’air, l’eau et la nourriture… Bref, il ne s’agit pas de quelques substances, mais d’un véritable « cocktail » auquel nous sommes exposés quotidiennement, de manière différente d’un individu à l’autre. « C’est vraiment la menace invisible. Nous n’avons pas de tests permettant d’affirmer “Là, il y a des perturbateurs endocriniens”. Et quand on ne sait pas, on applique le principe de précaution, surtout pour des enfants atteints de maladies », résume Olivier Kah, également auteur du livre Les perturbateurs endocriniens.

Perturbateurs endocriniens, que faire ?

Vu leur diversité, éviter les perturbateurs endocriniens s’apparente un peu à une mission impossible. Mais il reste possible de limiter notre exposition en choisissant les produits les moins dangereux – en prenant garde de « ne pas forcément opposer produit chimique et produit naturel ou biologique », précise Nicolas Bertrand, expert en prévention des risques professionnels à l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS). « Certains produits naturels peuvent aussi être toxiques. » Étudiez donc leur composition et suivez les quelques recommandations ci-contre, non exhaustives.

Avis d’expert

Gérer calmement la question des perturbateurs endocriniens

À faible dose, nous avons encore du mal à prouver la nocivité des perturbateurs endocriniens. Nous devons trouver des analogues qui soient dépourvus des effets toxiques avérés, mais nous ne pouvons pas proposer des alternatives si nous ne comprenons pas ce qui se passe. Faire l’amalgame entre tous les perturbateurs endocriniens potentiels et interdire très vite, c’est dangereux car on ne se donne pas non plus le temps de pré-tester les molécules de substitution. Je crois qu’il faut que les parents gèrent calmement cette question. On peut par exemple leur conseiller de varier l’alimentation, manger des boîtes de conserve avec modération et laver quand c’est possible les produits frais pour éliminer les pesticides de surface.

Comment éviter les perturbateurs endocriniens ?

Dans la maison :

  • Éliminer canapés et matelas anciens, fabriqués avant 2005, dont la mousse contient probablement des retardateurs de flammes.
  • Attention aux jouets et aux revêtements en plastique, que les enfants peuvent lécher.

Dans la salle de bain :

  • Attention au rideau de douche en vinyle qui peut libérer des phtalates à haute dose.
  • Choisir des savons et shampooings sans additifs (ou le moins possible) et oublier les lingettes.
  • Prendre garde aux perturbateurs endocriniens qui se cachent sous la dénomination « fragrances » ou « parfums ».
  • Éviter particulièrement les substances suivantes : propylparaben, butypraben, benzophénone, BHA (hydroxyanisol butylé), triclosan, éthylhexyl methoxycinnamate, méthylisothiazolinone, cyclopentasiloxane, suspectés d’être des perturbateurs endocriniens.

Dans la cuisine :

  • Préférer aux poêles et casseroles recouvertes d’antiadhésifs celles en inox, en céramique ou en fonte non émaillée.
  • Éliminer les ustensiles et contenants en plastique pour les remplacer par d’autres en métal, en bambou ou en verre.
  • Conserver la nourriture dans des récipients en verre.
  • Ne pas réchauffer de la nourriture au micro-ondes dans des récipients en plastique mais utiliser des récipients en céramique ou en verre (bisphénols et phtalates sont davantage libérés des plastiques à haute température).
  • Éviter le film étirable.
  • Consommer des produits frais et si possible bio. Pour information – et pour réduire la facture – sachez que la laitue, les fraises, les tomates, les pommes figurent parmi les fruits et légumes les plus chargés en perturbateurs endocriniens.
  • Laver et éplucher les fruits et légumes non bios.
  • Consommer modérément les poissons qui sont de grands prédateurs (saumons, dorades, loups, thons…) car ils peuvent présenter une importante concentration de polluants.

Conseils de lecture sur les perturbateurs endocriniens :

  • Le cerveau endommagé, Barbara Demeneix, éd. Odile Jacob, 2016, 39,90 €,
  • Les perturbateurs endocriniens, Olivier Kah, éd. Apogée, 2016, 22,80 €,
  • Imprégnation des femmes enceintes par les polluants de l’environnement en France en 2011, étude publiée en décembre 2016.

Merci à :

  • Nicolas Bertrand, expert en prévention des risques professionnels à l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) ;
  • Patrick Balaguer, chercheur à l’Inserm.