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Une souffrance qui se dit sans mots Version imprimable Suggérer par mail
05-02-2008
La douleur est une réalité. Les personnes atteintes de polyhandicap peuvent avoir mal, mais pour les soignants, rechercher la douleur, y croire, et la traiter est une autre chose?… Pour apprendre comment est soignée une personne qui souffre de polyhandicap, il est intéressant aussi de savoir comment elle meurt, dans quelles circonstances et entourée de quelle affection. Ces situations difficiles nous aident à mesurer le chemin parcouru ?– et celui qui reste à parcourir?…

La douleur niée de Mathilde
Mathilde est une petite de 12 ans qui se déplace un peu lorsqu?’elle est soutenue. Elle s?’exprime peu, mais elle est gaie, participe à tout et son humeur est plutôt joviale.
Pour des raisons médicales, une opération sur sa hanche a été nécessaire. Elle a ensuite été transférée dans un centre de rééducation pour retrouver ses capacités antérieures. Mais dans ce centre, personne ne la connaît. Personne ne sait que Mathilde est une petite adorable, participante et qui sait très bien exprimer des choix cohérents. Au centre, Mathilde refuse très vite qu?’on la touche. L?’approche du kinésithérapeute la rend folle. Elle s?’oppose. On imagine qu?’elle fait une phobie de la rééducation et on la renvoie chez elle.
Elle retourne dans son IME, mais ne veut plus se mettre debout, elle ne s?’appuie plus sur sa jambe. Elle est? triste. Du temps passe. Ses parents insistent pour qu?’une radiographie soit faite?: la hanche de Mathilde est détruite. Cette petite fille pouvait, s?’est exprimée par une opposition qui a mal été interprétée. Sa douleur n?’a pas été reconnue. Comment pouvait-on avoir l?’idée de soulager une douleur non réelle??
L?’histoire de Marie n?’a rien d?’exceptionnel, malheureusement. Les professionnels qui l?’ont soignée n?’appartiennent pas à des équipes débutantes, ou peu professionnelles ou dont la compétence est à remettre en cause. Tous les soignants peuvent être «?coupables?» d?’une pareille négligence.

Un code à décrypter
Une personne qui souffre peut s?’exprimer ou se taire. Lorsqu?’elle s?’exprime par des mots, les choses sont clairement énoncées, elles peuvent être mesurées et si les soignants n?’ont pas assez de compassion pour entendre la douleur et apporter un soulagement, la personne peut s?’exprimer différemment, crier, se révolter, aller chercher de l?’aide?…
Lorsqu?’elle se tait, elle s?’exprime aussi car le silence est expression pour quelqu?’un qui parle habituellement. Le silence peut s?’accompagner d?’une fuite, d?’un refus, d?’une opposition. Et le décryptage de la douleur est possible, même s?’il n?’est pas facile.
Une personne polyhandicapée ne s?’exprime pas par des mots. Son expression est unique et? il n?’y a pas de code qui soit commun avec d?’autres personnes. Il n?’y a pas de langage spécifique aux personnes polyhandicapées comme il y a un langage spécifique aux personnes sourdes par exemple. Il n?’y pas de langage que l?’on pourrait apprendre. Chaque personne polyhandicapée s?’exprime selon un code qui lui est propre et qui peut être déroutant.
Ainsi un enfant polyhandicapé peut contracter les muscles de son visage pour exprimer un sourire qui sera interprété comme une grimace de douleur par les inconnus mais qui sera en fait une manifestation de joie reconnue par ses proches. Seuls ceux qui vivent au quotidien avec la personne en question, qui ont appris à la connaître jour après jour, qui ont eu la patience de décrypter ses messages et surtout qui ont eu le désir de la comprendre, connaissent le code.
Personne d?’autre mieux que l?’entourage proche peut porter la parole de la personne polyhandicapée pour exprimer sa douleur.
Selon les personnes interrogées, les estimations de la douleur seront très différentes. Un technicien de recherche qui irait dans tous les centres relever la douleur des personnes polyhandicapées ne reviendrait pas avec les mêmes chiffres que celui qui iraient dans chaque famille interroger la mère de l?’enfant.

Une affaire de compassion
Imaginons un enfant polyhandicapé aux urgences, face à un médecin qui n?’a jamais eu l?’occasion de rencontrer une telle personne. Imaginons que ce médecin ait reconnu une personne humaine, vivante, digne d?’intérêt et de soins. Quelle sera son estimation de la douleur devant un enfant silencieux qui plie à peine sa jambe lorsqu?’on la touche. Saura-t-il reconnaître qu?’il y a une douleur de fracture?? Et saura-t-il soulager cette douleur qu?’il n?’a pas reconnue?? Aura-t-il l?’intelligence et le temps d?’écouter la personne qui accompagne et de croire à son interprétation?? Sa compassion, moteur de son action, ne peut s?’exercer facilement face à un enfant polyhandicapé, il n?’a pas de code pour rentrer en communication avec lui. Sa compassion va s?’exprimer face à la souffrance de la mère qui souffre pour son enfant, si elle parvient à parler pour lui et à être entendue.? Ce n?’est pas toujours le cas.
Quand à la petite Mathilde, elle n?’avait pas son papa ou sa maman près d?’elle pour parler à sa place et quand ils venaient la voir, qu?’ils la voyaient souffrir et qu?’ils le disaient, on ne les croyait pas car on ne croyaient pas qu?’ils connaissaient le code de communication avec Mathilde mieux qu?’un professionnel, si compétent soit-il.
Il existe une échelle de douleur spécifique aux personnes polyhandicapées, qui tient compte de tout cela. Cette échelle n?’est pas assez exploitée dans les établissements.

Une question de temps
Soigner une personne humaine, vivante et digne d?’intérêt. Lui apporter des soins, savoir prendre des décisions thérapeutiques graves dans un cadre pluridisciplinaire, sans se précipiter, peser le pour et le contre, estimer la balance des bénéfices et des risques, informer la famille, lui permettre de participer aux décisions finales.
C?’est idéal. Mais ce n?’est pas tout. Il ne faut pas oublier le principal?: le temps.
Le temps n?’est pas le même pour une personne polyhandicapée, il ne signifie rien pour elle à vrai dire. Gagner du temps, ne pas perdre de temps, être efficace, travailler dans le temps imparti?: elle est à des années lumières de cette réalité.
Prendre le temps d?’observer, de regarder, de capter le regard, d?’attendre. Attendre leur sourire, leur grimace, leur signe de présence. Dire un mot. Attendre. Attendre une réponse, rester à l?’affût d?’une réponse, répéter le mot. Un mot, un seul. Entendre la mère qui explique qu?’il est mal installé. Retrouver le silence, Redire un mot. Rester attentif.
Et lui laisser le temps. Le temps de s?’accoutumer au lieu, à la nouvelle voix, le temps de s?’assurer qu?’il n?’est pas abandonné, que sa mère reste à côté.
Il a capté ma présence, il entend un mot, il le digère, il décide qu?’une manifestation de sa part serait bienvenue,? il veut s?’exprimer, il se concentre sur le mouvement à faire?… trop tard on ne le regarde plus.

Aucune rentabilité?!
Lui laisser le temps de l?’apprentissage aussi. «?Pour son anniversaire de 10 ans, me dit une maman, il m?’a fait un cadeau?: il a réussi à prendre le petit nounours que son frère lui offrait et il l?’a secoué pour faire du bruit, c?’était la première fois, c?’est merveilleux. Il l?’a secoué, il a compris que pour avoir le bruit il fallait agiter le nounours. Il a mis 10 ans, qu?’importe, c?’est la preuve qu?’il peut progresser encore.?»

Dans les soins à donner aux personnes polyhandicapées, aucune rentabilité n?’est possible. Si on accepte?cette perte?de temps ou plutôt si l?’on comprend que cette perte n?’est rien en regard de ce qu?’elle nous apporte en humanité, alors on peut travailler dans le monde des plus fragiles et se sentir gratifier dans son travail.

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Retrouvez le guide Mon enfant est polyhandicapé sur la boutique du Magazine Déclic.?

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JujuDoc - Un très bon document sur ce su ? | 92.145.12.218 | 03-04-2011 15:24:16
Je porte à votre connaissance un très bon travail d'une amie qui avait réaliser son mémoire sur ce thème.
http://www.academon.fr/Mémoire-ou-thèse-L'évaluation-de-la-douleur-chez-la-personne-polyhandicapée/10875
bernard ? | 90.95.43.228 | 17-10-2009 17:04:42
en tant que maman je pense qu'on comprend nos enfants,par les yeux ma fille me faisait comprendre beaucoup de chose,atteinte de la maladie de krabbe,apres des mois de souffrance,mais remplis d'amour ma puce est partit a l'age de 7 mois,et jours apres jours je n'ai rien lacher j'etait a ces coter,elle me sentait pres d'elle.
ouraoui - faire confiance aux parents ? | 81.66.180.54 | 19-06-2009 19:23:00
je suis une maman qui s'ocupe de ma petite sarra, qui est atteinte d'une maladdie genetique orpheline, et c'est vrai elle crie pour se faire comprendre, et a force j'ai pu diferencier ses crie, quand elle a fain, ou elle veu etre changer, ou bien quan elle a mal, et c'est vrai que quelque fois on tombe avec des professionel qui me di ses des caprices, et je veu leur repondre je voudrai bien qu'elle en fasse, mais bon;
nicolas - le temps qu'on vole au temps ? | 77.197.72.209 | 08-06-2008 23:48:17
C'est vrai que ça prend du temps de comprendre ces personnes qui ne parlent pas et ont chacune un code de communication si différent!
C'est vrai que voir leur douleur ne va pas de soi et si souvent nous passons à côté de la souffrance en parlant de "mauvais caractère".
C'est vrai qu'on ne s'improvise pas interprète et que seules l'expérience et la connaissance fine permettent un décodage toujours fragile toujours à questionner.
C'est vrai que le temps est un tyran qui ne nous laisse aucun répit et nous rend aveugle entre les toilettes, les repas, les mises aux Wc... tout ce qu'il faut faire si vite et si souvent à leur place faute de temps pour leur participation.
On peut pourtant voler du temps au temps, un peu. Cela demande d'être organisé en mettant cette organisation au service de la personne polyhandicapée afin que les minutes volées au quotidien permettent un regard plus long, une participation minime mais réelle, un échange qui peut même devenir complice si on est attentif, une autre manière de comprendre un refus ou un cri.
"Voleur de temps" est une compétence nécessaire à tout professionnel accompagnant des personnes en situation de polyhandicap. Cette compétence est cruciale, elle devrait figurer sur nos CV et dans les items des démarches qualité.
Savons nous assez voler du temps?
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